- 12 interventions plastiques (2008) sur chronographie 1984/1986
(de la 133ème des bribes tirées de la mort de Don Juan)
édition Dys 1990 (500 exemplaires)
Le texte :
Diaphane est le mot (ou n’est-ce pas translucide ?) Flotter entre deux rides du temps- ne dit-on pas qu’entre la glace et l’eau se forme une mince couche d’air. C’est ainsi que vivent les Apaches, songeait Josué ils sont issus de ces mêmes ondes, de ces mêmes couches, ils ne sont pas morts, ils vivent beaux de cette transparente beauté que l’agonie pose en caresses savantes sur le masque de la mort.
Flexion des bras
Sans cesse
Vêtue de blanc
Se mordillant le petit doigt
Je n’ai pas voulu aborder Ithaque en conquérant, mon retour a été celui de l’humilié. Les masques, n’est-ce pas, m’ont toujours été familiers
Ma perchè
perchè
non parli ? Criait Josué en jetant son stylo sur la feuille.
Qui anime nos figures qui
anime nos figures ? Ta vie, ta vie, disait Dieu, est-elle autre chose qu’un songe ?
Il
Baisse la tête
Soumis ?
Après tout peut-être que la nature n’est elle-même que petite fille boudeuse jouant avec des figures à peine plus complexes. Mais tes indiens, où sont-ils ? perdus dans quelle zone obscure et débile de ton esprit de vieillard ? Perdus comme entre la fresque et son voile d’enduit, entre les os et la peau des momies, se perd la vie.
Auréole
Ou
Nuage
Nimbent
son cou
Offert
Il reste que seule, la statue, s’animant, m’échappa, Elle seule tint sa promesse. D’elle seule j’étais en droit de ne rien attendre.
(ou est-ce la vie des choses qui nous tue ?)
Mes songes, grommelait Josué, valent bien l’ombre des dieux.
N’était-elle pas qu’une illusion ? N’était-elle vraiment qu’une illusion ? Écrire au fil du temps et
de cette incertitude au temps
se soumettre comme inacceptable donnée
Elle
La revenue
Sur elle-même
Accroupie
Tu ricanais, Josué, tu prétendais que je me lamentais sur le sort du marionnettiste
la statue seule
seule tint sa promesse d’elle seule pourtant je n’attendais rien
Diaphane comme ma mémoire (vous êtes de Paris, non ? Vous êtes de Paris, disait-elle. Non, non, c’est là bas que vous vous êtes connus, disait-t-il . Ah , Ah ! la capitale, disait-elle
clap clap
La capitale) Et c’est la mort comme les mots sur les mots posés.
Il y avait ce crucifix et ce vieillard suspendu entre ciel et terre et entre ciel et terre écrivant posté au seuil de son silence
Josué si
lence sentinelle
des regards
ce que jamais plume n’avait pu ou su écrire
aux arbres les fleurs comptent les fruits
Josué connaissait cette fatigue des peuples lutteurs quand, longtemps après que l’on a cru leur fin largement révolue, ils sortent soudain de la mort et
parlent (de sorte qu’un plongeur prisonnier sous la glace aurait le temps) ou encore ces voyages entre la toile et les pigments, entre deux couches de peinture, entre la fresque et son masque ou son voile, ou son cache.
Mais ce déguisement n’en était pas un car il faudrait
son regard
doucement
se pose
s’embue
volette
autour des choses
que sa voix caresse
Je ne sais pourquoi, j’avais toujours rêve de posséder l’un de ces mannequins animés, de ces "automates" qui, à l’instar du joueur de M. de ***- donnent si imparfaitement- et pourtant de si fascinante façon- l’illusion de la vie. N’était-elle pas qu’une illusion ? L’ombre d’une ombre, figée, finie ? fallait-il forcer son pauvre esprit ( ses pauvres forces)
à l’attrait de la plume et du papier.
Entre la glace et l’eau, un nageur pourrait se sauvegarder. Ithaque ma pierreuse m’a saisi, Ithaque, ma terre, bien assez riche, gorgée de blés, de vins, île propice aux arbres qui donnent aux vents parfums et paroles. Que viennent des temps élastiques, que viennent les ouragans.
Passante,
(Cheveux au bord du cou)
Le poignet droit s’envole
Agrippé à ses doigts.
Fallait-il forcer son pauvre esprit à l’attrait de la plume courant (indifférente). Fantômes errants des pouvoirs, je vous hais,
disait Josué. C’est la solitude.
c’est
l’ a
lente
attente entre
quatre murs.
ç’avait été la sérénité, cette pâleur du visage, cette rigidité des membres pourtant. Ils donnent aux vents parfums et paroles, ma terre, impropre aux courses, accueillante aux chèvres et aux boeufs, (pourtant).
Dire que j’y avais mes racines n’est pas qu’une façon de parler. Ainsi plongé comment aurais-je pu perdre ma route ?
Que viennent les ouragans, cyclones, tornades, tempêtes heureuses criant, qu’elles nous emportent, nous assourdissent, que meurent les murmures du monde. Et l’on croit que quelqu’un tire les fils qui nous donnent nos postures. Ne vous ai-je pas dit que, de la statue seule j’étais "en droit" de ne rien attendre ?- Non, "en droit" n’est pas le mot ; je voulais dire que d’elle seule il était raisonnable que je n’attendisse rien.
Cette discipline est peut-être sotte, se disait Josué, comme toute discipline, peut-être, mais comme toute discipline, soumettant le corps, elle peut laisser rêver que l’esprit se libère.
A cinq minutes près toutes les trente minutes. Fantômes errants des pouvoirs, vous ramassez les bribes de la loi, l’eau délavée des pourpres. De Paris, dit-elle, de Paris, oh ! ajouta-t-elle, il est chouette le Dupuis, là... Ce n’est pas un Dupuis, dit-il. Lieux d’inspiration, lieux de traces que tant de générations ont laissées
entre quatre murs
c’est un
Duchêne. Et toi
Tu
Tu t’étonnes tu
T’inquiètes
Tu
Questionnes tu
Sans trêve
Pourtant
(C’est la fatigue presqu’heureuse de qui a su flotter entre deux rides du temps) à le regarder fixement, je me faisais croire que la peau, juste un instant, avait frémi.
Que viennent des temps élastiques, que ne demeurent
que les cris de l’angoisse la plus stridente. Non, pas mes rêves, non, mais vraiment la réalité des images, des effigies grossières que nous sommes, postées au seuil d’un autre réel. Cinq minutes, toutes les trente minutes, il y avait là une incertitude du temps, qu’il ne pouvait longtemps supporter.
tranquille
tu l’accueilles
Elle se love
Se blottit
te pénètre
s’installe
Indifférent
tu la câlines
Vous n’êtes, dit-il que l’ombre pâlie d’ombres ténues.
Ce que les murs accueillent, se mesure en indice de réfraction de la lumière en jeux du prisme renvoyant plus ou moins à telle ou telle fréquence du spectre. Si je vous aime, vous ne le savez pas, si je
Diaphane est le mot (translucide). Je pouvais croire qu’à travers ses lèvres entrouvertes, un souffle, si faible fût-il, était passé
Imprévisible
Tourment
Ou tourmenté
que, derrière les paupières closes les yeux avaient bougé comme on le voit faire au dormeur plongeant dans le rêve
Pointe le doigt
Le va-et-vient du jour
Vous
Dans ces jeux du temps tout -dans sa vie- devait atteindre une précision sinon de la seconde, du moins de la minute.
Diaphane comme notre mémoire
Rêve
l’aspect de la tranquillité. Je rêvais d’images parlant soudain, de statues s’animant, et nous voici donnant le souffle, impulsant le sang dans des veines de pierre, capables de faire jouer des muscles de marbre, ou ruisseler des fronts de métal.
pointe le doigt
effleure le mur
penche la tète
tend le regard
s’immobilise
rêve
si je vous
L’angoisse la plus au bord du dernier souffle du dernier râle. Elle est venue
Splendide
(pleureras-tu longtemps sur la mort du marionnettiste ?
C’est bien suffisant que de vivre -socialement et littérairement- le temps à la minute près. A quel )
Ombres pâlies d’ombres ténues dans des crépuscules glauques
Si je vous aime, vous ne vous en doutez pas. La vie est ainsi.
Diaphane est la fatigue comme un voile sur ma vie pensait Josué. Tu t’astreins à cette
L’aspect de la tranquillité, comment ne pas le prendre pour la vie enfin maîtrisée
Je tentais, forçant ma pensée, Ainsi dans ma terre s’ancrait mon droit, comment aurais-je pu perdre ma route. Et que dire d’autre ? Comment, comment aurait réagi Michel -Ange ? Il avait déjà réalisé des expériences de ce genre, quand, encore adolescent, il soumettait sa rêverie au temps bien plus lent de sa plume
Vous n’êtes qu’écrans de fumées, rêves d’ivrognes planant
La vie, la vie est ainsi solitude. Si une étoile brille seule, son éclat paraîtra-t-il plus fort ? Et dans la multitude que di
Diaphane, disait Dieu. Tu n’es vraiment pas loin de Forçant sa pensée, la dirigeant, et se figurant les lobes et les circonvolutions à l’intérieur de son crâne- la projetant à l’intérieur de lui. Tu n’es vraiment pas loin de la
je n’aime, en somme que Est-elle vraie cette anecdote que l’on raconte de Michel-Ange ? Qui n’a connu cette même rage ?
Freinant les profusions d’images, s’y fondant, , les tenant
(rêves d’ivrognes planant)
proprement par les rênes. Les va-et-vient du jour balaient les surfaces et apparaissent alors, en réserves les mots, en reliefs, les couleurs
Reliefs -dit-on- des restes
Ruderi
Et dans la solitude qui dira
Josué
Tu n’es pas loin de la
mortification de ce
de renouer les fils brisés ou de retrouver ceux qui devaient être restés intacts.
Il fallait qu’ils meurent : comment aurais-je pu perdre ma route ? Je n’aime en somme que
la mort tranquille
Désinvolte et
Attentif
Il
s’alourdit
sur les choses
Jusqu’au jour où -plus sensible -peut-être, aux attitudes qu’aux propos, aux actes qu’aux intentions, je m’aperçus que je les tenais par des fils de mots.
Josué
lence sentinelle
des regards
posté
silence sentinelle Josué était posté
Tu attends
Et le temps passe
Et la vie
passe et les regards
pas loin de ce
de cette lente construction de la mort
Langue lentement courant
On ne cloua pas le cercueil, on le vissa, mais la perte dans l’angoisse apaisante quand je les tenais par des fils de mots qu’il suffisait de tel propos pour voir changer l’expression d’un visage.
En avais-je rêve de cet impossible ! Que soudain l’image s’échappe sans que ma volonté et mes calculs n’y puissent rien.
Que ma séduction soit vaine La chair est indolente et l’esprit malléable
Les tenant par les rênes et tirant sur le mors ; soumise elle suivit au point que bientôt la plume -son vagabondage sur le papier, la fluidité plus ou moins grande de l’encre- dicta sa mesure au rêve et à l’esprit
Rêves
d’ivrognes planant sur les vomissures et les déjections
C’est après la main tendue à la statue
Fantômes des pouvoirs je vous hais
Lieux
Ils rêvent et nos rêves s’y ancrent - excroissances diaphanes sur des squelettes ou des momies-
Nos mots rêvent et nos rêves s’y ancrent
Montagnes qui voguent
Langue lentement courant
La vie s’écoule -disait Josué. La vie coule et le sang et nos pleurs et nos mots et nos pensers enfin s’attachent à ce peuple du vent que la mort ne saurait saisir
Mais on m’avait refusé d’assister à la mise en bière aussi
Il fallait qu’ils meurent, il fallait qu’ils paient le prix installés dans ma ville, dans mon palais
L’angoisse de ceux qui
parlent haut
rejetant la tête en arrière
dans des défis continuels
Qui n’a connu sa rage ? Je m’aperçus que certains mots étaient propres à soulever des sanglots, d’autres des joies fugaces, qu’il n’était pas jusqu’à la posture qui ne se pût modeler d’une plume ou d’un regard Ainsi elles
Je n’aime que
La perte dans l’angoisse apaisante
quand
Elle m’étouffe et m’envahit
M’étouffe je suis
s’accroche à ses lunettes, à
son visage, elle se pend à
chacun de ses mots, à ses
hoquets et à ses hésitations
Les yeux ouverts ou fermés ne résistent guère au regard exercé, les corps plient
Ils sont bien loin tes indiens, disait Dieu, qu’est-ce qui dictait la rêverie de tes Apaches ? Sur quelle mesure se modèlent aujourd’hui leurs rêves ?
Es-tu l’image de ces ombres ? Disait-il encore à Dieu. Où est ton assise ? Où
s’alimente Ta puissance ? Montagnes qui voguent sur la banalité de nos propos.
De la mort ils tirent non leur absence mais comme leur transparence
On m’avait refusé d’assister à la mise en bière aussi devais-je parvenir parfois à me persuader que, d’une manière ou d’une autre- ce qui avait échappé à mes regards n’avait pas été, que le cocon de bois était vide
Regards inquiets terreur (vide)
Et ondoyante
Elle danse sa vie
Installés dans ma ville, dans mon palais, mangeant mes réserves et pillant ma maison, il fallait qu’ils meurent
et que la terre boive leur sang et que
sa jupe la suit
sa voix
profonde
de
nuit
La chair est indolente et l’esprit malléable mais non la pierre mais non
l’image de la mort
Sur quelle mesure se modèlent aujourd’hui leurs rêves ? Mon rythme en ce moment est-il différent du leur quand, toutes les trois secondes et trois dixièmes tombe le bip de quatre centièmes suivi -si près- du mot ?
Où s’alimente Ta Puissance ?
A la banalité de nos propos
Sans cesse il se fend
S’efface
Ombre intriguée
qui glisse
Quelque chose ils sont en quoi l’oeil ou les doigts se heurtent
Qui en même temps discrètement se cache ou
se cèle
et
que je devais - un jour ou l’autre- au hasard d’une promenade retrouver soudain sa silhouette trapue sa démarche aux larges pas rejetés. Il fallait qu’ils meurent que la terre boive leur sang que la terre et le sang mêlés se forment en boue
Ne dit-on pas fertile ?
Je suis
Hésite de t
Elle attend que vienne
Ce qu’elle attend
Ainsi elles se croyaient insensibles !
Elles n’étaient que
l’objet modelé par
le rêve de mes désirs
s’installe
s’incruste
attend
La tête penchée
prière ?
Et qu’aurais-je pu dire d’autre que
et tendre la main ?
N’es-tu que leur image ? Ou, comme on l’a prétendu, l’ombre portée de la voix des peuples ? J’aime, en somme, solitaire, ce jeu des absences qui pousse la mémoire à bout, qui
donnent formes à nos souvenirs
(que je retrouverais ses attitudes de conteur
(je suis pantelant et vide quand je souhaiterais
la sérénité)
) Il suffisait que je parle pour les sentir soudain animées de ma seule
volonté
Seule elle avait tenu ses promesses
c’est la mort
suivi si près du mot. Comme ces incantations - ne modelaient-elles pas le rythme des rites et l’allure ondoyante des rêves. Qui sait ?
Je ne suis pas le chef, disait le chef
formes à nos souvenirs.
C’est à la fatigue qu’il devait de connaître aussi cet état dans lequel le corps quasiment disparaît dans une détente un écartèlement sans douleur
avance la tête
du regard elle tâtonne
Osera-t-elle
poser le pied droit
ou le gauche
d’abord
que je retrouverais ses attitudes de conteur, que j’entendrais à nouveau sa voix puissante jeter ses souvenirs inattendus, ses étonnantes comptines de buveur et de fumeur. Ne dit-on pas fertile ? Seule, elle ne répondait pas aux invites
c’est la mort
Perplexe ? De la main elle efface le bas de son visage, son regard lentement se lève, les yeux sourient
Qui sait si la cadence des rames n’a pas ici ou là donné la mesure des mythes. Ou le trot des chevaux ou...
Je ne suis pas le chef
Personne est mon nom La pomme près du tableau dilate mes papilles bien plus
que l’artiste
Je pensais que je retrouverais ses interpellations ses mélopées ses déroutantes exigences
Elle tendre elle
L’aime regarde elle
s’extasie
La voix s’alanguit La pose
se creuse la tête se penche
de son coté
que les gorges éclatent, que les visages s’empourprent
avant de
devenir livides
Je délaisse l’écrire
seule elle
c’est la mort
Nos rêves ne sont-ils pas fils du temps ?
Il devrait y avoir une légende à ce sujet...
Je ne suis pas le chef mais la voix ou la langue
bien plus que l’artiste n’excite mes sens et mon esprit.
L’objet peut-il nier l’oeuvre qu’il inspire ?
Et nos lieux ?
ruisseau en fond de gorge
Mon peuple, pleure
profond
Et je le vis bien souvent dans les villes les plus diverses
Il parle d’autre chose
aux moments d’errance ou de désarroi, assis sur le banc d’un jardin
que les narines et les bouches ne connaissent plus que l’odeur, le goût, l’épaisseur, la fluidité fade du sang
Je délaisse l’écrire
Je le rêve, je ne vis plus que pendu au temps
Et c’est la mort
Et c’est le feu
Il regrettait qu’au rythme imposé à ses rêves, au temps nécessaire
de l’écrit
répondît l’esclavage de la feuille (
Derrière leur appareil photo Y-a-t-il le regard u maître du Fuji ? Ils passent)
Avez-vous un mot pour dire que je n’ai de pouvoir que de mon peuple que je n’ai de pouvoir que d’être la voix qui ne s’éteindra pas même si mon peuple s’éteint
Et nos lieux ?
N’est pas
là
Au delà de tout
Il erre
Au delà d’elle
elle
erre
ma triste
s’effaçant
mêlé à la foule des boulevards
à la devanture d’un marchand de fruits à Rome
Que les crânes éclatent sous le heurt des masses ou du sol
et vivre m’environne et me cerne et je
Perdu
ne
sais que dire j’attends
si
parle
bouge
tourne
dit
Et soudain
seule
inspirée
se tait
Et c’est la glace
Ah ! pouvoir écrire ici tout en regardant là bas, et le regard fouillant les creux
Et nos lieux ?
pourraient-ils faire mourir ce qu’en nous ils suscitent Ils le pourraient sans doute s’ils étaient éternels
sortant d’une taverne tchèque
marchandant devant un étalage sarde
que monte la puanteur des peurs avant celle de la mort
les miennes
traits qui souffrent
Son corps retient à peine
Gracile
le sol
Et tu parles parce qu’il faut
ce monde n’est vraiment que
Ici ma vie et si
quand la jambe s’avance
La tête suit
Et l’oeil s’arrondit
de ne rien reconnaître ? C’est l’étonnée
fouillant les faiblesses du plâtre Oh
ce regard
Qui déblaie ce qu’il voit
Pour retrouver ce qu’il aime
Fidèle
Laisser les yeux rêver leurs rêves tandis que rêvent les mains
Je ne suis que le souffle...
C’est la mort qui
nous fait rêver
ombre passant dans une ruelle athénienne
ou attendant - au petit matin devant un abri de chantier
Ce monde n’est vraiment que
Ce qu’il semble être pourquoi
pourquoi
Les fleurs qui naissent
Ne sont-elles belles
Que de leurs
futurs ?
les miennes
de corps déliés
Anima mia è notte
anima mia è morte
l’uom di pietra l’uom di sasso
Ai-je encore pris une avance sur mon temps ? (Je n’ai pas voulu aborder Ithaque ma pierreuse en conquérant ; je n’avais aucun des attributs du pouvoir. J’ai retrouvé mes bords sous l’aspect de l’humilié)
Je l’ai vu dans tous les endroits d’animation, de bruit, de commerce, de vie, et sans trêve m’échappant ou s’évanouissant, comme si ses traits
que les corps déliés s’abandonnent que les poitrines s’affaissent en cherchant un dernier souffle Incapables même de gémir
Pourquoi alors pourquoi vivre ?
Josué se rappelait aussi ses propos
vérification
comme si ses traits se fanaient ou se fondaient ne me présentant plus qu’un visage inconnu
Que seuls résonnent les bruits sourds des corps qui tombent, d’os brisés, de ruisseaux chargés d’air
pourquoi
Quelle étrange connivence y-avait-il entre lui et ce personnage que l’on croyait formé aux plaisirs pervers ?
mon lit seul s’accrochant à ma terre liant mon repos à ma terre
Nous ne rêvons de nous qu’absents et cette oeuvre enfin est
le
souvenir de la porte perdue, ou de la pomme disparue et sans cesse m’échappant ou s’évanouissant comme si ses traits se fanaient ou fondaient ne me présentant plus qu’un visage inconnu
Incapable même de gémir que seuls résonnent les bruits sourds des corps qui tombent pourquoi
et tout ceci au fond pour reprendre d’anciennes images n’est-il enfin que matériau brut ou à peine dégrossi
j’avais appris à mon coeur le calme, à mon esprit la raison, profitant simplement -sans exaltation- du bonheur fugace de ces apparitions et trouvant enfin un plaisir nouveau en le voyant disparaître à saisir le moment où surgirait
un autre visage
d’os brisés
de ruisseaux chargés d’air
de râles saisis au delà de toute souffrance
pourquoi
entendre encore les moteurs vrombir
les coeurs
battre
les bruits d’armes lancées de corps tétanisés emportant des objets dans leurs ultimes soubresauts
Faut-il que nous mourrions quand nos objets s’animent ? Et les Apaches
songeait Josué
Malheureux pourquoi détruire un mur si beau ? Pourquoi détruire la porte
et il faut dire que la fresque semblait
C’est que tu vois le mur mais non
quelqu’un monte... Si ce n’est pas un visiteur, que ne penserai-je encore pas de ma solitude !
Qui êtes-vous donc ?
Et toi
C’est le souvenir de la porte perdue, du mur arraché Comment
comment un objet pourrait-il n’être objet que
de lui-même ?
Et toi
que ta mort traîne par le bras
les sirènes hurler les foules gronder pourquoi songeait Josué les Apaches ne sont-ils morts que pour donner une âme aux choses ?
C’est que tu vois le mur et non ce qui agite mon coeur
qui
Qui êtes-vous ?
Toute vie t’attache à la vie
Ce qui en nos lieux
en nos mots
s’est perdu
nous fait rêver
les vagues pourquoi
il faudrait pouvoir
Que ta mort traîne par le bras
toute vie t’attache à la vie
qui te rapproche de la mort
Tu nous ressembles
C’est
Qui êtes-vous donc ?
Ou est-ce la vie des choses qui nous tue ?
C’est que tu vois la statue mais non ce qui trouble mon coeur.
Vous
que la mort emporte ?
ombres fragiles d’un pouvoir ? Rois disparus, seigneurs, maîtres, cendres qui se croient braises, vous n’êtes plus capables que de servir d’humus aux prurits de la terre Il fut aussi lueur foudroyante dans la nuit.
Ils devaient mourir.
Comment aurais-je pu perdre ma route ?
Ainsi parlait-il dans la grande salle, sous l’aile de la mort
Tu nous ressembles
Mais toi tu le sais
Il serait bon de n’être qu’une main tenant son soc d’encre et faisant son sillon de mots je ne sais je ne sais
ma
perchè
perchè non parli ! hurlait Dom Josué en jetant son stylo sur la feuille
Se savait-il
se
Et Dieu restait distant.
la
Eli Eli lama Sabacthani ?